Une nuit de chasse

La lune brillait déjà haut dans le ciel lorsque je sortis de chez moi, de noir vêtu, l'arc et le carquois sur l'épaule. Je marchais d'un pas décidé dans les rues désertes du centre ville de Beacon Hill, les lampadaires éclairaient faiblement mon passage. Je passais telle une ombre dans cette ville fantôme. Quelques maisons étaient encore éclairées de l'intérieur on pouvait y voir un jeune couple ou encore une vieille dame et son chat.

Ces quelques humains encore éveillés à cette heure tardive de la nuit ne se doutaient sûrement pas du danger qui rodait dehors, sous leurs fenêtres, au fond de leurs jardins. Et j'étais là pour éliminer ce danger, j'étais la pour les protéger du mal qui se léchait les babines en les voyant se coucher tranquillement dans leurs lits douillets. Le surnaturel n'avait pas encore pris le dessus, j'étais là pour m'en assurer. Les habitants n'avaient pas encore pris au sérieux les prédictions des vieux sages, ils ne croyaient pas aux babillages de ces fous. Ils lisaient des fois dans le journal des alertes enlèvements, disparitions et meurtres en tout genre mais ils tournaient rapidement la page pour lire le tirage du loto. Même si tout ces faits étaient proche d'eux, ils n'en tenaient pas compte.

«Ce doit encore être un gamin qui a fugué ou qui s'est perdu dans la forêt! Ils en font encore tout un plat!» disaient-ils en râlant.

Le jour où ils se retrouveront en face de la bête sanguinaire leurs moues amusées disparaîtront rapidement. Et j'espère être là à temps avant que le loup ne se jette sur leur gorge pour les tuer d'un trait, mais pas trop en avance pour qu'ils se rendent compte que les murs de leurs maisons ne sont pas une barrière suffisante contre ces monstres de la nuit. Je rigola jaune à cette réflexion.

Le bruit de mes pas sur l'herbe fraîche me sortirent de mes réflexions. J'étais arrivée à l'orée de la forêt de Beacon Hill, elle était sombre malgré l'astre lumineux au dessus de ma tête. Sans crainte apparente je m'y enfonça rapidement. Après avoir marché une dizaine de minutes dans le bosquet, j'entendis un bruit sourd non loin de moi. Je m'arrêta, me baissa et observa les alentours. J'allais repartir lorsque je vis du coin de l'oeil une fourrure brune, éclairée pas le clair de lune, se mouvoir en silence. Je me leva et partis à sa poursuite...

Une nuit de chasse

Les arbres se dressaient tout autour de moi, élevant une sorte de barrière entre la lune et le sol. Les branches me foutaient à présent le visage, les racines sortaient du sol pour me faire chuter, les feuilles séchées étaient quand à elle présentes pour me faire repérer par le loup-garou que je poursuivais. Heureusement, j'étais rapide et agile, j'arrivais à le suivre sans qu'il ne se doute de ma présence, je n'étais qu'une simple ombres entre les fougères et les chênes millénaires. Je ne ne quittais plus la bête des yeux, mon regard était fixé sur sa fourrure poisseuse. Il s'était arrêté  à présent, balançant sa tête de gauche à droite, il semblait perdu, apparement il reprenait son souffle. Je me tapis encore plus dans les fourrés, je détacha mon arc et sortis une flèche de mon carquois. Tout cela dans un silence absolu. Je plaça ma flèche et ferma un yeux pour avoir le bon angle de tire. Le loup garou était en plein centre.

« De doit être un tout jeune transformé, sinon il ne se serait pas attardé dans cette forêt si proche des chasseurs! » pensais-je intérieurement.

Mais cela ne me dérangeais pas outre mesure, ce serait donc une proie facile. Je n'aurai pas besoin de la traquer toute la nuit.
Soudain un bruit attira mon attention, au dessus de ma tête. Je leva rapidement les yeux, là-haut une silhouette se dessinait, tel un singe elle se déplaçait toute proche de la canope. Malheureusement, la bête l'entendit aussi puisque que ses oreilles se dressèrent et ses yeux s'écarquillèrent. Elle tournait la tête dans tous les sens cherchant une sortie qui pourrait l'éloigner des deux humains -si tenté que l'acrobate au dessus de ma tête fut de mon espèce. Elle prit rapidement sa décision et prit la poudre d'escampette. Avant qu'elle ne sorte de ma ligne de mire je réussis à lancer ma flèche qui se planta dans son flanc gauche.

«Merde!
-Et toi ! Je l’ai vu en premier, va chasser ailleurs !» cette voix grave venait du haut des arbres

«C'était donc un chasseur! »

«Je pense que TU devrais aller chasser ailleurs, je te ferai remarquer qu'un chasseur digne de ce nom sait se montrer discret et n'essaie pas de revendiquer la proie d'un autre!» mon ton était sec et tranchant

Je réfléchis pas beaucoup plus à cet inconnu. Ma proie venait de s'échapper et je devais la rattraper le plus rapidement possible, arriver la première avant que "l'homme des arbres" ne le tue. Je venais de me lancer un défi, cela mettait du piment dans ma chasse nocturne.
Ce ne fut cependant, pas tâche facile puisque le lupin courrait à toute allure dans la forêt sombre. Le souffle court, j'essayais de ne pas me laisser distancer mais la course n'était pour l'instant pas mon point fort. Heureusement, je connaissais assez bien ce coin de la forêt. Je sus que devant nous aller se dévoiler une petite clairière où je pourrais l'attaquer par surprise. Je m'éloigna de ses traces et alla me mettre sur un rocher qui surplombait la scène en toute discrétion. Le loup était là, planté en plein milieu...

Une nuit de chasse

Mes jambes avaient du mal à suivre le rythme effréné que je leur imposait, j'avançais tout de même assez lentement dans la dense forêt. Je marchais sur la mousse fraîche pour que le bruit de mes pas soit absorbé, si bien qu'on entendait seulement un léger bruissement qui ressemblait à un souffle d'air. Je contourna la clairière devant moi puis me plaça en surplomb de la scène. La lune éclairait l'endroit d'une lumière étrange, presque fantomatique. Le loup se tenait en plein de milieu, l'air inquiet et le souffle court. Il pensait sûrement m'avoir échappé mais aussi à l'autre chasseur qui se fondait plutôt bien dans le décors, derrière un buisson touffu. Seul son souffle qui faisait vibrer les feuilles alentours trahissait sa présence. Mais l'animal ne sembla pas s'en rendre compte, puisqu'il commença à tourner en rond.  

Alors que je cherchais une solution pour le tuer sans qu'il ne s'enfuisse une nouvelle fois, je vis l'homme qui poursuivait aussi la bête sortir son arc et y placer une flèche brillante. Avant que je ne puisse dégainer ma propre arme, sa flèche traversa l'espace qui la séparait de la bête en un temps record avant de se planter dans le corps du loup-garou. Celui-ci n'émis qu'un simple soupir avant de s'effondrer sur le sable de la clairière. La bête n'était pas morte, elle respirait lentement. Il avait dû lui lancer une flèche anesthésiante pour ne pas le tuer sur place. Le chasseur se tournait à présent vers moi la mine ravis.

«Quel con celui là! » pensais-je

Il souriait bêtement avant de se diriger vers le centre de la clairière où roupillait MON loup-garou. Je rageais intérieurement, il n'a aucun respect pour les autres chasseurs celui-là! Pour couronner le tout il ne le tue pas sur place contrairement à ce que l'on m'a appris.


Je me tenais en face de mon premier cadavre de loup-garou. Ce dernier était étalé sur le sol en terre, il saignait à l'endroit où mon père avait porté le coup fatal. À part cette tâche vermillon l'animal était en parfait état, sa fourrure bien que mêlée ne portait aucune autre plaie. Mon père avait fait du bon boulot en le tuant d'un coup et d'un seul. Grâce à cela la bête n'avait pas tellement soufferte, ou du moins pas longtemps. C'est comme cela que nous faisions dans notre famille depuis la nuit des temps. Un seul et unique coup.
Alors que je me perdais dans mes pensées,  mon père s'approcha de la silhouette étendue au sol. Et dit de sa voix grave:

« À présent vient une étape cruciale. Que ferais-tu du corps à présent, si tu étais à ma place?

- Je l'enterrerai!  répondis-je alors qu'il ne s'adressait pas à moi

- Non! Ces montres ne le méritent pas! Pas contre ils méritent de savoir que nous sommes là afin de les traquer et de les tuer!

-  Du coup on fait quoi? demandais-je d'une petite voix

- On nettoie le sang et on le laisse là. Les loups-garous comprendrons que c'est une menace et que nous somme dans le coin. Généralement cela suffit à ce qu'ils partent. Tu as bien retenus Amanda, c'est une tradition pour les chasseurs de notre famille. Respecte-là »



Je secoua la tête pour revenir à la réalité. Ce souvenirs datait de mes 7ans, depuis ce jour là je n'avais envisagé aucune autre issue pour les loups-garous. Apparemment cet homme ne devait pas connaître cette méthode, à moins qu'il ne la respectait pas volontairement. J'étais la pour perpétuer cette tradition!


« Dommage, il est à moi maintenant. Pas assez rapide dommage. »

Pendant ce temps il avait eu le temps d'enlever les flèches et de couvrir les plaies. Je ne comprenais absolument pas pourquoi il faisait tout ce cirque pour ce démon de la nuit. C'était totalement ridicule! Je me contenta de le regarder le mettre sur son épaule puis me fondis dans l'obscurité des bois. Je réfléchissais à plein régiment tendit que je suivais le chasseur avec une discrétion de jaguar.

Au bout de quelques minutes je vis la bête bouger, ses yeux papillonnaient tandis qu'elle sortit de son semis-coma. L'homme à la voix grave n'avait pas du bien évaluer les capacités de sa flèche tranquillisante. L'animal commençait sérieuse à gigoter sur ses larges épaules.

Je sentis le danger arriver et à juste titre au moment ou je me jetais sur la bête afin de la dégager du chasseur, elle ouvrait sa large gueule pour lui mordre la nuque. Heureusement pour tout le monde, je lui atterris dessus avant que le cou du chasseur ne soit déchiqueté. Je me trouvais à présent sur le loup à présent parfaitement éveillé. Il me sauta au cou à une vitesse hallucinante, je me jeta sur le côté tandis que ses crocs me frôlaient la peau. Il se redressa en un rien de temps avant de renouveler son attaque, je sortis un poignard de ma botte et au moment où l'ombre de la bête se projetait sur mon corps au sol, je planta mon arme tranchante dans son cœur. Ses yeux devinrent soudainement vides avant qu'elle ne s'étala lourdement au sol.

J'étais moi-même couché sur le sol froid de la forêt mais de mon côté la vie m'animait encore. Je tourna mon regard vers le chasseur qui n'avait pas dû tout comprendre de la scène, je soupira entre deux expirations:

« De rien, je viens de te sauver la vie. »